Négocier des accords et améliorer le dialogue social dans l’entreprise
CSE : Préparez vos Négociations Annuelles Obligatoires en 2025
Hausse des défaillances d’entreprises, multiplication des plans sociaux… La conjoncture économique ne semble pas porteuse pour les négociations annuelles obligatoires (NAO). Pourtant, toutes les entreprises ne sont pas affectées de la même manière par la crise. C’est la raison pour laquelle Alice Rustique, du Centre Etudes & Data du Groupe Alpha, et Jean-Marc Etienne de Secafi, recommandent aux organisations syndicales et aux élus d’un comité social et économique (CSE) de préparer leurs négociations. Comment ? Après un bref rappel juridique et un aperçu des tendances pour les NAO 2025, vous trouverez une série d’arguments préconisés par nos experts.
NAO : que dit la Loi ?
- Êtes-vous concerné par les NAO ?
Les négociations annuelles obligatoires concernent les entreprises au sein desquelles sont constituées plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives et dans lesquelles est présent au moins un membre de la délégation élue du personnel au comité social et économique. En général, ce sont des entreprises d’au moins 50 salariés.
- Quand doit avoir lieu la négociation ?
Plusieurs types de négociations peuvent avoir lieu dans l’entreprise : accord sur la Qualité de Vie au Travail, sur les Emplois et les Compétences et sur le partage de la valeur. Toutes ces négociations ne se font pas à la même fréquence. Sur ce dernier sujet, il est fortement recommandé de négocier annuellement surtout vue l’évolution de la conjoncture actuelle.
- Sur quoi porte cette négociation ?
Les NAO sont l’occasion de négocier la rémunération (salaires, temps, de travail, partage de la valeur ajoutée), l’égalité professionnelle (mesures mises en place pour compenser les écarts de rémunération). Aucune obligation, cependant, d’aboutir à un accord mais seulement d’ouvrir la négociation.
- Qui y participe ?
Les représentants de l’entreprise, les organisations syndicales et les élus mandatés sont sollicités. Les salariés peuvent être consultés par les élus du CSE avant la négociation.
Quelles tendances pour les NAO 2025 ?
Afin de prendre le pouls des négociations 2025, les économistes du Groupe Alpha et les experts de Secafi ont étudié les premiers accords signés dans les entreprises. Sur un échantillonnage d’accords, il ressort trois grandes tendances générales.
- Peu d’entreprises prévoient des augmentations
La première, c’est que peu d’entreprises prévoient des augmentations. Sur 108 accords d’entreprise portant sur les évolutions des salaires en 2025 étudiés et signés entre septembre et novembre 2024, seuls 62 précisent des budgets d’augmentation.
- Des augmentations de 2,33 % en moyenne, contre 3,5 % en 2024
La deuxième tendance, c’est que les augmentations – quand elles existent – sont en baisse, comparées à 2024, avec un taux moyen de 2,33 %, contre 3,5 % en 2024 : 2,23 % d’augmentation pour les cadres, 2,36 % pour les professions intermédiaires et 2,41 % d’augmentation pour les ouvriers et employés.
- Renforcement des primes individuelles
Enfin, dernier élément qui caractérise les NAO 2025 : la mise en place d’une grande diversité de mesures périphériques dans les entreprises étudiées. Et, notamment, des primes individuelles, d’ancienneté ou de performance, par exemple. 56 % des entreprises ont opté pour des mesures de ce type. « Cela traduit un changement de priorité dans les motifs d’augmentation, avec un recul de la logique de maintien du pouvoir d’achat au profit d’une logique de rémunération de la performance », analyse Alice Rustique, Chargée d’études économiques au Centre Etudes & Data du Groupe Alpha. Le recul de la prime de partage de la valeur ajoutée confirme cette tendance, d’autant plus que les moyens distribués sont en baisse : 714 euros, contre 862 € en 2024. En d’autres termes : les négociations s’annoncent tendues pour 2025…
Comment argumenter vos NAO en 2025 ?
- Centrez vos analyses sur les spécificités de votre entreprise
Les difficultés actuelles sont sectorisées et localisées. Malgré une hausse des défaillances d’entreprises depuis la période Covid et une multiplication des plans de sauvegarde de l’emploi, il se peut que votre entreprise ne se porte pas si mal. Certains secteurs sont épargnés et se portent bien. C’est le cas de l’énergie des transports et de l’agroalimentaire, qui ont augmenté leurs marges en période d’inflation. L’aéronautique manque de main d’œuvre pour répondre aux commandes. Dans les services, plusieurs secteurs voient leurs marges progresser : les services aux entreprises, les services immobiliers et les services marchands, notamment. De la même manière, certains territoires sont plus dynamiques que d’autres. Notamment l’Île-de-France et la Bretagne, qui affichent une croissance dynamique d’emplois. « Alors que les arguments des NAO 2023/2024 pouvaient se baser sur la situation macroéconomique plutôt porteuse, les NAO 2025 seront davantage tournées vers l’analyse sectorielle et microéconomique », estime Alice Rustique. D’où l’intérêt, selon elle, « de se focaliser sur la situation de votre entreprise, pour tempérer les éventuels discours alarmistes des directions ».
- Rappelez que, si l’inflation ralentit, le niveau des prix, lui, continue d’augmenter
« La décrue de l’inflation, la désinflation, ne signifie pas que les prix baissent », rappelle Alice Rustique. C’est une réalité à mentionner dans le cadre de négociations. Selon les dernières prévisions de la Banque de France, l’inflation atteindrait 1,5 % en 2025, contre 2,5 % en 2024. Les prix poursuivent donc leur hausse. C’est le cas, notamment, des produits de première nécessité, comme l’énergie, l’alimentation ou les produits frais (qui ont pris respectivement + 46 %, + 22% et +26 % en quatre ans). A rappeler également : l’inflation a battu des records historiques ces dernières années (+ 5,2 % en 2022, record inégalé depuis 1984). Et ce n’est pas la décrue actuelle qui va suffire à la compenser. « Or, l’un des enjeux et des objectifs des NAO, c’est bien de défendre le pouvoir d’achat des salariés », indique Jean-Marc Etienne.
- Une perte de pouvoir d’achat historique dans le secteur privé
Depuis 2021, la croissance des salaires s’est fait largement dépasser par la hausse des prix, ce qui a entraîné des pertes de pouvoir d’achat inégalées depuis les années 2000. En cumulé, depuis juin 2021, les salariés ont perdu environ 4,1 points de pouvoir d’achat. Si l’on prend en compte l’inflation alimentaire, ces pertes s’élèvent à 9,4 points depuis trois ans. Même si l’inflation a diminué et que le pouvoir d’achat revient légèrement, les pertes de pouvoir d’achat subies depuis quatre ans ne sont donc pas effacées. « Vous pouvez chiffrer les pertes de pouvoir d’achat subies dans votre entreprise en utilisant une méthode de cumul sur deux, trois ou quatre ans, suggère Alice Rustique. Pour éviter que la direction ne se concentre sur un léger retour actuel du pouvoir d’achat, il est important de raisonner en cumul depuis une date antérieure plutôt qu’en glissement annuel. »
- Analysez le partage de la valeur ajoutée dans votre entreprise
Depuis plusieurs années, on assiste à un déséquilibre du partage de la valeur ajoutée au détriment des salariés. Une part de moins en moins importante de la valeur ajoutée est redistribuée aux salariés et la part des profits dans la valeur ajoutée se maintient, voire progresse. « Les entreprises ont profité de la période inflationniste pour augmenter leurs marges, donc la part des profits dans la richesse créée, déformant de plus belle le partage de la valeur », précise Alice Rustique. En 2023, les entreprises du CAC40 ont atteint 153 milliards d’euros de résultat nets cumulés, un chiffre multiplié par trois sur dix ans et ont ensuite redistribué ces résultats aux actionnaires. D’après Vernimmen, le manuel de référence en matière de comptabilité financière d’entreprise, en 2023, les entreprises du CAC40 ont distribué 97 milliards d’euros à leurs actionnaires, dont 30 sous forme de rachat d’actions, soit le niveau le plus haut jamais enregistré depuis près de 20 ans ! « En partie aidées par les aides publiques, les entreprises du CAC40 ont su utiliser leur pouvoir de marché pour naviguer sur la vague inflationniste », résume Jean-Marc Etienne.
Conclusion : les actionnaires ont réussi à s’assurer un surplus de valeur ajoutée alors que les salariés en subissent le coût à travers des pertes historiques de pouvoir d’achat. Sans oublier que les entreprises ont bénéficié de baisses d’impôts ces dernières années alors que les ménages ont vu leurs taux de prélèvements augmenter et qu’il n’y a pas eu de répercussion positive des allègements d’impôts pour les entreprises sur l’emploi, les salariés ou l’investissement. « Ces allègements ont plutôt bénéficié aux marges et aux dividendes », constate Alice Rustique. C’est la raison pour laquelle nos experts préconisent d’analyser l’évolution de la répartition de la richesse créée au sein de votre entreprise auprès des différentes parties prenantes : les salariés, l’Etat, les banques, l’entreprise et les actionnaires. Pour, ensuite, revendiquer un rééquilibrage du partage de la valeur lors des NAO 2025. Vous pouvez aussi chiffrer les gains liés aux aides publiques, baisses d’impôts et baisses de cotisations patronales pour questionner leur utilisation : investissement, recrutements, salaires ou bien marges et dividendes. Pour, ensuite, demander une transparence sur l’utilisation de ces économies et revendiquer un partage des gains.
- Rappelez que la politique salariale est un investissement pour l’entreprise
Vous pouvez étudier les tensions sur l’emploi dans votre entreprise, par services, par catégories sociaux professionnelles, par métiers, pour, ensuite, adapter les revendications salariales aux profils des salariés et trouver un équilibre entre les augmentations collectives et individuelles.
- Creusez le sujet des exonérations sur les bas salaires
Les exonérations sur les bas salaires désincitent les entreprises à augmenter ces salaires, créant des trappes à bas salaires. Pour négocier une hausse de ces salaires les plus bas, vous pouvez chiffrer les économies réalisées grâce aux exonérations, questionner l’utilisation de ces économies et leurs conséquences sur la distribution des salaires pour, ensuite, recalibrer vos revendications salariales. Astuce : l’outil en ligne de l’Urssaf pour chiffrer vos revendications. Il permet de simuler le coût d’une revendication pour l’employeur et les avantages pour les salariés.
- NAO : procédez avec méthode
« Il est primordial de choisir ses priorités pour construire des revendications », insiste Alice Rustique. C’est la raison pour laquelle nos experts vous accompagnent pour procéder par étape en définissant des objectifs sur la base d’informations collectées, en associant une revendication par objectif et une cible « plancher » et « plafond » à chaque revendication, tout en prévoyant des arguments pertinents ainsi que des alternatives négociables et un chiffrage précis de chaque position.
Les organisations syndicales et les Comités Sociaux et Économiques (CSE) jouent un rôle central dans la définition et la gestion des dispositifs d’épargne salariale et d’intéressement au sein des entreprises. Leur implication active contribue à aligner ces mécanismes sur les intérêts des salariés et à renforcer la cohésion sociale au sein des organisations.
Les syndicats et le CSE ont la responsabilité d’informer et de sensibiliser les salariés aux avantages de l’épargne salariale et de l’intéressement. Une communication claire sur les mécanismes existants, les avantages fiscaux, et les impacts positifs de la participation renforce l’adhésion des employés.
Une fois les dispositifs en place, les organisations syndicales et le CSE veillent au suivi et au contrôle de leur mise en œuvre. Cela inclut l’évaluation régulière des performances des plans d’épargne, la transparence des informations fournies aux salariés, et la garantie du respect des accords conclus.
Comment agir avec le CSE ?
Secafi peut vous accompagner avec un appui technique pendant toute la durée de la négociation.
La négociation portant sur la réduction du temps de travail émerge comme un enjeu stratégique où le Comité Social et Économique (CSE) détient un pouvoir significatif. En 2024, les discussions autour de cette thématique cruciale soulèvent des défis liés à la conciliation entre productivité, bien-être des salariés et efficacité opérationnelle.
Votre CSE dispose de plusieurs moyens d’action pour contribuer à la réduction du temps de travail au sein de l’entreprise. Cela peut inclure la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail, les horaires flexibles, le recours au temps partiel, ou d’autres arrangements visant à atteindre l’objectif de réduction du temps de travail.
Le CSE peut également intervenir sur ce sujet lors de l’information-consultation sur les orientations stratégiques en mettant en avant les avantages pour la santé des salariés, la productivité, ou d’autres aspects liés au bien-être au travail.
Secafi peut vous accompagner dans l’analyse des enjeux liés à la réduction du temps de travail, notamment en ce qui concerne les aspects financiers et organisationnels.
La négociation sur ce sujet crucial nécessite une implication forte du Comité Social et Économique, doté de moyens d’action significatifs pour promouvoir et instaurer des politiques équitables au sein de l’entreprise.
Le CSE a le pouvoir d’analyser la situation en matière d’égalité professionnelle au sein de l’entreprise. Cette étape cruciale permet de mettre en lumière les éventuelles disparités salariales, les écarts de représentation dans les postes à responsabilités, et autres inégalités persistantes.
Comment agir sur ce sujet ?
Les nouvelles dispositions légales prévoient que le CSE peut mandater un expert pour accompagner les organisations syndicales dans la négociation d’un accord sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail
Depuis la crise covid 19, la mise en place du télétravail est un sujet qui traverse les entreprises et les réunions de CSE et de négociations !
Face à cette transformation des modes de travail, le CSE et les organisations syndicales assument un rôle central dans la négociation des modalités de mise en place du télétravail, portant sur des aspects organisationnels, sociaux et juridiques.
Le CSE peut négocier avec l’employeur pour établir des règles claires en matière d’horaires, de disponibilité, et d’espaces de travail à distance, garantissant ainsi une mise en place équitable et respectueuse du bien-être des salariés.
Secafi, avec l’appui du Centre Etudes & Data du Groupe a mené plusieurs analyses d’accords sur le sujet.
Au niveau de votre entreprise, vous pouvez agir …
La Qualité de Vie au Travail, au-delà d’être un simple concept, représente un vecteur essentiel pour le bien-être des travailleurs, la performance des entreprises et la pérennité du dialogue social.
La négociation sur la QVT vise à établir un équilibre harmonieux entre les exigences professionnelles et les aspirations personnelles des salariés. Les horaires flexibles, le télétravail et d’autres dispositifs contribuent à cet équilibre, favorisant une meilleure conciliation.
Comment agir avec le CSE ?
Secafi peut vous accompagner dans la mise en place d’une démarche partagée et progressive, impliquant tous les acteurs de l’entreprise et donnant lieu à des plans d’action concrets.
La négociation sur ce sujet crucial nécessite une implication forte du Comité Social et Économique, doté de moyens d’action significatifs pour promouvoir et instaurer des politiques équitables au sein de l’entreprise.
Le CSE a le pouvoir d’analyser la situation en matière d’égalité professionnelle au sein de l’entreprise. Cette étape cruciale permet de mettre en lumière les éventuelles disparités salariales, les écarts de représentation dans les postes à responsabilités, et autres inégalités persistantes.
Comment agir sur ce sujet ?
Les nouvelles dispositions légales prévoient que le CSE peut mandater un expert pour accompagner les organisations syndicales dans la négociation d’un accord sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail